ÉGLISE et ESSOR Économique


WULMER, anglo-saxon du Boulonnais, peut plus facilement que d'autres prédicateurs atteindre la population locale: il pratique la vie érémitique à EECKE avant d'aller fonder un monastère à SAMER en Boulonnais et de recevoir en 688 le roi anglo-saxon du WESSEX, CHEADWALA.

OMER fonde le monastère de SITHIU, à l'embouchure de l'AA, aidé par son disciple BERTIN. Tous deux y laissèrent leur nom. Le monastère de WORMHOUDT est fondé par le Breton WINOC qui mourut en 715 et dont le corps fut transféré au IXe siècle sur le GROENBERG, au monastère de BERGUES SAINT-WINOC qui lui doit son nom.

Ces monastères sont d'importants centres économiques et culturels qui contribuent à la naissance et au développement d'agglomérations commerciales. Ils constituent les principaux relais des routes que suivent les pèlerins venus d'Angleterre dans leur voyage vers ROME.

La route qu'empruntent les 3 princesses anglo-saxonnes qui font l'objet de la légende des 3 Vierges de CAESTRE, passe par la traversée de la Mer du Nord, jusqu'au golfe de l'YSER, la remontée de la rivière de la PEENE jusqu'à WORMHOUDT où les moines ont installé un hospice pour les pèlerins, puis, par terre, rejoint CAESTRE où les princesses sont assassinées. Ensuite, par STRAZEELE, qui veut dire « carrefour », les 3 jeunes filles auraient dû gagner ARRAS et son monastère, puis le Bassin Parisien, la vallée de la Saône, celle du Rhône, et embarquer à MARSEILLE pour ROME.

MILDREDE, jeune princesse anglo-saxonne elle aussi, va en France parfaire son éducation à la célèbre abbaye de CHELLES, près de MEAUX, sur la route qui se dirigeait vers la vallée de la Saône.

Au retour, pour regagner l'Angleterre, elle arrive à MILLAM, sur les bords du golfe de l'AA, entre WATTEN et BERGUES. Elle y apprend à soigner la maladie locale, la fièvre des marais. Enfin, elle retourne par le bateau chez elle à THANET, où elle devient l'abbesse du monastère.

Aujourd'hui, à MINSTER IN THANET, près de RAMSGATE, une partie de l'abbaye abrite des reliques de sainte MILDREDE, retrouvées à DEVENTER, Pays-Bas, autre port fréquenté par les marins Anglo-Frisons et situé au début de l'autre principale route de pèlerinage qui, au haut moyen âge, par le RHIN et les cols alpestres, rejoignait l'Italie.

Les invasions normandes du IXe siècle, surtout à partir de 870, engendrent un processus de fortification des places de commerce jusque là ouvertes ou trop simplement protégées par de maigres palissades en bois.


Normands, COMTES, et Bourgeois


Le premier marquis puis comte de Flandre est du type aventurier qui s'assure la possession de la Flandre à l'occasion des batailles qu'il mène pour la protéger des Normands, chez nous des Danois. Son surnom de « Bras de Fer » en français, « Ferreus » en latin, vient de son surnom flamand « YSERIN » dû à son lieu de naissance dans un château entre deux bras de l'YSER, non loin de NIEUWPOORT. C'est ainsi que BALDUINUS FERREUS, BALDWIN YSERIN, est devenu BAUDOUIN BRAS DE FER dans l'historiographie de Flandre française.

Le 2ème comte de Flandre, BAUDOUIN II, fait s'élever sur la côte des « BURG » pour protéger le pays OOSTBURG, AARDENBURG, FURNES, BERGUES, BOURBOURG (BROEKBURG). Luttant seuls contre les Normands, les marquis puis comtes de Flandre, s'affranchissent progressivement de l'autorité du souverain carolingien puis du roi de France. C'est également au phénomène normand qu'est dû le poème épique GUDRUN, dont la 3ème partie provient de chants contemporains originaires des côtes de la Mer du Nord et dont certains personnages (JUDITH) ou lieux (GUINES) évoquent l'entourage du 1er Comte de Flandre.

Alors que les marais, souvent par suite de collaboration entre les paysans et les communautés religieuses, sont asséchés et deviennent des terres drainées et irriguées, les comtes de Flandre stimulent le commerce par l'implantation de foires: ainsi à YPRES, MESEN, LILLE. Le marché et la foire sur la grand-place, le Bourgeois ou POORTER, les groupements de marchands en GILDES et HANSES qui obtiennent peu à peu du Comte par des chartes ou KEURES, des Privilèges, les halles aux draps, caractérisent ces villes.

L'agglomération naissante de BAILLEUL (BACULIOLUM veut dire « fortifié avec des pieux ») a peut être été fortifiée dès la fin du IXe siècle, avant de l'être en 1079 par le comte de Flandre ROBERT LE FRISON lequel avait dû se résoudre à combattre, victorieusement, le Roi de France à CASSEL, en 1071. Sa première mention officielle date de 1093. BAILLEUL est alors délimitée par une ligne de circonvallation tracée par les « Stadsgrachten », « fossés de la cité ». Autour du noyau primitif délimité par les actuelles rues d'YPRES, des Viviers, du Musée, elle s'étend vers les rues de LILLE et d'Occident et comprend une Grand-Place. Au XIIe siècle apparaissent la rue des Foulons, ouvriers du textile, puis les faubourgs drapiers de SCHAARLAEKEN et BREEMERSCHEN (vers la gare actuelle). En 1177, BAUDOUIN, châtelain de BAILLEUL au nom du Comte de Flandre, autorise la ville à avoir un Beffroi et une cloche, puis peu après, le droit de posséder un scel (sceau) et une Poorterie (Bourgeoisie). Les armoiries de BAILLEUL sont reprises sur le scel des échevins et apparaissent à ce titre dès 1237 sur une cire suspendue à un acte officiel.

Dans les cités de Flandre, l'Eglise possède aussi influence et propriétés: en 1180, l'église de MESEN (MESSINES) reçoit du Comte de Flandre une terre située à NIEUWKERKE et BAILLEUL, avec les droits de juridiction, justice et seigneurie.

Riche et prospère, la Flandre excite la convoitise de son suzerain et voisin, le Roi de France, qui annexe les marges méridionales du Comté en 1191. Peu après, BAUDOUIN IX reprend AIRE et SAINT-OMER mais quitte le pays pour une croisade dont il ne reviendra pas, terminant sa vie comme Empereur de Constantinople fait prisonnier par les Bulgares en 1205.


Les Guerres médiévales de la Flandre et de la France


Dès lors, PHILIPPE AUGUSTE, tuteur de la fille de BAUDOUIN, la Comtesse JEANNE DE FLANDRE, veut imposer sa volonté. En 1213, il brûle les cités de BAILLEUL, STEENVOORDE, HAZEBROUCK, et dévaste le pays de CASSEL. En 1214, FERRAND DE PORTUGAL, le Comte de Flandre, l'époux de JEANNE, se révolte, mais il est battu à BOUVINES.

L'influence française règne en Flandre au XIIIe siècle. Le roi arbitre les querelles successorales entre les DAMPIERRE et les AVESNES. Il s'appuie sur les riches Bourgeois des villes qui détiennent le pouvoir financier et arborent la bannière royale à fleur de Lys: les LELIARTS. Les paysans et artisans soutiennent plutôt le comte et sortent les griffes du lion : ce sont les KLAUWAERTS.

En 1297, PHILIPPE LE BEL annexe LILLE et augmente la pression fiscale. Il emprisonne à TOURNAI les curés des paroisses ST.-MAURICE et ST.-SAUVEUR de LILLE, coupables d'avoir défendu les traditions et franchises de leurs paroissiens. Les KLAUWAERTS se révoltent : en 1302, au cours des Mâtines de BRUGES, ils égorgent les partisans du Roi.

Le 11 Juillet, à COURTRAI, combattant à pied, ils taillent en pièces l'armée du Roi et la chevalerie française conduite par ROBERT D'ARTOIS, frère du Roi. C'est la bataille dite des éperons d'or, lesquels sont dérobés aux chevaliers à terre.

A la suite de la bataille de MONS-EN-PEVÈLE en 1304, PHILIPPE reprend la Flandre Gallicante, où l'on parle le Français et constituée des châtellenies de LILLE, DOUAI, ORCHIES. Il incendie LILLE pour faire un exemple et réaffirme son droit de suzeraineté sur toute la Flandre.

A partir de 1322, année où LOUIS DE NEVERS s'impose comme comte de Flandre face à son oncle ROBERT DE CASSEL et grâce à l'appui du Roi de France, la révolte gronde depuis le ZWIN et BRUGES jusqu'au NEUF-FOSSE et l'AA. Accablés d'impôts, les petits paysans, libres propriétaires, des châtellenies de FURNES, BERGUES, CASSEL, BOURBOURG, se regroupent et refusent la pression fiscale et le pouvoir des nobles inféodés au Roi. En 1324, ils se révoltent une première fois. Une deuxième révolte éclate en 1326 mais est également apaisée. Une troisième révolte éclate en 1328: sous la conduite de Nicolas ZANNEKIN, les nobles sont massacrés. Le roi PHILIPPE DE VALOIS intervient, franchit le NEUF-FOSSÉ à RIHOULT-CLAIRMARAIS et bat l'armée flamande à CASSEL.

Cette bataille fit plus de 3000 morts. Les meneurs furent exécutés, les chartes et privilèges confisqués et remis au comte LOUIS DE NEVERS. Le vainqueur fixa les indemnités que les vaincus durent verser et ordonna la saisie des biens de tous ceux qui avaient pris part à la lutte du côté des perdants.

Les rapports avec la France ne s'arrangent pas pendant le XIVe siècle car la Flandre Flamingante s'affirme anglophile tandis que le Comte et la Flandre gallicante se montrent francophiles. En 1382, le Roi de France intervient à nouveau et bat d'ARTEVELDE, meneur des Gantois et Brugeois, à ROOSEBEKE.

A la mort du Comte LOUIS LE MALE en 1384, PHILIPPE LE HARDI, Duc de Bourgogne, époux de MARGUERITE fille de LOUIS LE MALE, ajoute la Flandre à ses possessions de Bourgogne et d'Artois.

Dans la plupart des batailles, les milices communales régulières, encadrant des volontaires, avaient accompli leur devoir. Les milices de BAILLEUL, très anciennes, avaient déjà pris part aux Croisades avec leur seigneur en 1098 et 1192, avant de combattre le roi à BOUVINES, COURTRAI, CASSEL, ROOSEBEKE.

A MONS-EN-PEVELE, les milices les plus gravement touchées sont celles de DOUAI: elles perdent 600 hommes, ce qui explique que les armoiries de la cité soient de gueules à la flèche d'or frappant l'écu d'où sort un flot de sang qui laisse apparaître 6 gouttes.

L'industrie et le commerce du drap sont à la base du développement des cités flamandes. La laine importée d'Angleterre sert à fabriquer la " Belle Draperie " dont l'exportation touche de lointains pays.